"La libre vérité fut mon unique étude" (Nicolas Boileau)
09h15 le
neuf-quinze
Il parait que l'Europe va interdire aux
agences de notation de noter les dettes souveraines de certains
pays. Elles sont "dans le viseur" de l'UE, expliquent
les gros titres. Satisfaction du téléspectateur: ce
renversement de viseur n'est que justice, depuis qu'elles tiennent
elles-même les pays dans leur viseur. Rappelons simplement que
ce réveil intervient après que la commission avait accru
le pouvoir des mêmes agences (dans des conditions
controversées, d'ailleurs, qui avaient donné lieu en
août au 835 e épisode de la saga Mélenchon
contre Quatremer (1)).
Quatremer, en tout
cas, est sur le coup, et il est allé regarder sous les gros
titres. "Pour limiter la casse, raconte-t-il
dans Libération, les agences se livrent à un
lobbying effréné. Non sans succès. Ainsi, Michel
Barnier, le commissaire européen chargé du Marché
unique, a dû en rabattre sur ses prétentions. Ses
collègues les plus libéraux ont obtenu que la suspension
temporaire (deux mois) de la notation d’un Etat soit
limitée au cas où il est déjà sous
assistance financière : pas question d’étendre
cette possibilité aux pays qui négocient un plan
d’aide (...) Enfin, la responsabilité civile des agences
est limitée aux seules erreurs intentionnelles,
l’incompétence échappant à toute
poursuite". Ouf ! Standard and Poor's pourra continuer d'appuyer
sur le mauvais bouton, elle ne risque rien.
A
propos d'aller voir sous les gros titres, peut-être
avez-vous lu d'un oeil distrait que Merkel juge la crise actuelle
comme "la plus grave depuis 1945". Mais devant le
congrès de la CDU, qui se tient à Leipzig, elle n'a pas
dit que cela. Le parti conservateur allemand est apparemment en train
de dessiner un vaste projet de réforme de l'Europe (information
que je trouve également dans Libé de ce matin,
sous la signature de Nathalie Versieux, envoyée spéciale
à Leipzig). Je résume: sanctions automatiques pour les
membres qui ne respecteraient pas le Pacte de stabilité,
possibilité de porter plainte devant la Cour européenne
de justice contre les Etats aux déficits excessifs,
possibilité de sortir «volontairement» de
la zone euro pour les pays qui le désireraient, sans quitter
pour autant l’Union européenne (...), mise des Etats non
vertueux sous la tutelle d’un commissaire européen
compétent pour prendre en charge les budgets, et intervention
automatique de la Cour européenne de justice (...) Mais aussi
taxation sur les transactions financières, renforcement du
poids des gros contributeurs - donc de l’Allemagne - au sein de
la BCE, et même... élection du président de la
Commission au suffrage universel. Rien que ça. Bref,
l'Allemagne veut bien payer (un peu) plus, pour financer une Europe
à l'allemande, ce qui me semble exactement à
l'opposé de ce que claironnait étrangement ce matin sur
France Inter Bernard Guetta, pour qui "l'Europe devient
française". Pour que les politiques français soient
interrogés sur ces sujets, on attendra le temps
réglementaire.
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