"Si y en a que ça les démanges..." (Citation connue)
09h15 le
neuf-quinze
Pourquoi
un livre donne-t-il, d'emblée, avant lecture, une impression de
complète réussite ? D'abord le titre, bien entendu. A cet
égard, "Sarko m'a tuer" est évidemment un bon titre,
malgré son aspect "cliché". Un recensement méticuleux
des titres d'articles comportant les mots "m'a tuer",
depuis l'affaire Omar Raddad, faute d'orthographe incluse, donnerait
sans doute quelques milliers de résultats (et les livres se
comptent aussi à la pelle (1), comme le remarque Vincent
Glad sur Twitter). Mais si le livre explose comme une bombe, au-delà
de son argument de vente immédiat (l'infirmière qui aurait parlé à
la greffière), c'est parce que ce titre, aussi cliché soit-il,
cristallise en trois mots une réalité jusqu'ici largement perçue,
mais non formalisée. Elle n'échappait certes à personne: depuis la
création du site, comme
nous le rappelons ici (2), nous avons reçu sur nos plateaux
bon nombre de "clients" de Davet et Lhomme, bon nombre de
ces victimes du sarkozysme, de cette appropriation
privée de l'Etat (3), sans précédent depuis la monarchie,
et nous en avons suivi davantage encore. Mais en trois mots, la voici
enfermée, et soudain irréfutable. D'avoir simplement nommé la
chose, d'en avoir fait slogan, les auteurs méritent reconnaissance.
Le
contenu est à la hauteur, et surtout exceptionnellement
médiatisable. 27
victimes du sarkozysme, ce sont autant (ou presque) de témoins prêts
à se rendre sur les plateaux, 27 histoires à raconter, parfois
touchantes, parfois édifiantes, parfois discutables, toujours
intéressantes. Dans la seule matinale d'aujourd'hui, France Inter
réussissait par exemple l'exploit d'en inviter deux (Aurélie
Filipetti, et Dominique de Villepin). Et ce n'est pas fini.
Comme
tout titre, celui-ci comporte évidemment sa part de
raccourci. Peut-on
mettre sur le même plan des hauts fonctionnaires, des magistrats,
des policiers, des gendarmes, des préfets, mutés ou placardisés
pour crime d'indépendance d'esprit, ou des alliés disgracés, des
rivaux neutralisés, ou des adversaires politiques discrédités
(Dray, Boutin, Villepin, qui figurent parmi "les 27") ?
Daniel Bouton, écarté de la Société Générale sur demande
insistante de Sarkozy après l'affaire Kerviel, peut-il vraiment être
considéré comme une victime ? Est-il forcément scandaleux que la
défaillance, le défaut de vigilance d'un grand patron à salaire
pharaonique soient sanctionnés ?
Devraient-ils
être intouchables ? Bref, ce livre pose mille questions, dont je me
pourlèche à l'avance de pouvoir débattre, sur le plateau, demain,
avec les auteurs. Ils seront en compagnie d'un autre de leurs
"clients", Yannick Blanc (je vous laisse chercher pourquoi
Sarko l'a tuer, lui). Je fais du teasing ? Mais oui, je fais du
teasing !

(Montage
emprunté au blog Ze:bench)
Daniel
Schneidermann
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